Décorations
Cappiello ne pouvait être décorateur des rues grâce à ses affiches, sans être aussi décorateur d’intérieurs.
Il décora de nombreuses pièces dans des appartements et hôtels particuliers de la région parisienne avec des tapisseries et des panneaux décoratifs sur les murs et les plafonds. Son souci du détail l’obligeait parfois à aller jusqu’à concevoir le mobilier. On retrouve dans toutes ces réalisations l’univers extraordinaire et féerique de Cappiello. Un univers en mouvement dont les couleurs bien qu’adoucies par rapport à celles de ses affiches, restent toujours aussi gaies.
Il commence son métier de décorateur d’intérieurs en 1907 avec une salle à manger chez L. Louis-Dreyfus à Saint-Germain-en-Laye. Il s’agit de compositions inspirées de l’art du 18ème siècle.
Décoration aux Galeries Lafayette à Paris
En 1912 il réalise pour les Galeries Lafayette un salon de thé, un salon de lecture et un fumoir. Il y définit tout l’agencement : peinture, mobilier, vitraux, éclairage, tapis, uniforme des serveuses et il y dessine de grands panneaux présentant les quatre saisons et les quatre périodes de la journée. Louis Vauxcelles écrivait dans Gil Blas le 5 octobre 1912 :
« La Salle de thé est gaie, claire, lumineuse. Des verrières où, parmi des nuages roses, courent des pampres, où des fruits, glycines et oranges, s’entremêlent et s’entrelacent en jolis caprices ornementaux ; des guéridons et des sièges aux tons vivaces, des tapis, appareils d’éclairage et meubles, tout est disposé pour la joie de nos sens ; il y a un amour de petit kiosque où les musiciens jouent des valses langoureuses ou endiablées. – Cappiello a tout prévu jusqu’au costume des tea-girls (fourreau gris avec dépassant noir, couronne en hennin de lingerie empesée). Voici ensuite le Hall de lecture, régal d’harmonies osées et inédites, bien que reposantes et câlines, bleu-tendre, or et mauve ; au mur, des panneaux d’un virtuose du ton et de la forme, nymphes spirituelles, vaporeusement drapées ; des fauteuils vêtus de satin mauve appâli, un tapis ravissant, des lustres hardis où l’électricité fusera dans l’éblouissement du cristal… Impression de richesse discrète, goût parfait, enseignement précieux, qui guidera les visiteuses sans les brusquer. Enfin, le Fumoir, plus sévère, avec la note violet foncé, profonde et chaleureuse, des confortables fauteuils et la merveille de son vitrail, où des aras pourpre, citron, indigo lancent des cris de couleur, vaut à lui seul la visite au troisième étage des « Galeries ». C’est un chef-d’œuvre. »
Décoration d’une épicerie
Après la guerre de 14 il reprend la décoration d’appartements et d’hôtels particuliers. Ainsi, en 1920, il fait un plafond pour le baron Robert de Rothschild. La même année, une épicerie ouvre 20 rue Jean Goujon à Paris entièrement décorée par Cappiello. De ce fait tout Paris va la visiter et forcément, y acheter. Jean-Louis Vaudoyer, dans Les Echos de Paris du 13 août 1920, écrit :
Cappiello « s’est contenté de faire un fond aux boîtes de conserves, aux paquets de thé, aux litres de « blanc » et de « rouge », et il a fait recouvrir les rayons, le comptoir et la caisse d’une belle et franche couche cramoisie de couleur à l’huile. Sur ce fond chaud et franc, les étiquettes de boîtes de homard et de petits pois, les papiers d’argent, et les papiers bleu-indigo des sacs et paquets se détachent comme des émaux ; les vins et les liqueurs brillent comme des pierres précieuses ; – et, au-dessus, court une large frise, où, sur un fond de même tonalité écarlate, Cappiello a jeté une guirlande de personnages et d’attributs, qui rient, qui dansent, qui volent, tout resplendissants des couleurs les plus vives et les plus gaies. Voici les fées des épices, la reine du piment, la princesse du clou de girofle, l’aigre et pétulante souveraine des « pickles ». Voici les roses et appétissantes muses de la sucrerie, qui entourent, comme un petit Pégase, un cheval de massepain. Voici le gros Chinois qui laisse tomber de sa robe verte une escadrille de boîtes de thés ; voici la compagne de Diane, avec le faisan et le lièvre, et d’autres nymphes plus citadines, avec des vaporisateurs, des houppes à poudre ; voici des bacchantes qui portent les grappes au pressoir, et de jeunes beautés jardinières qui recueillent les fruits des compotes et des confitures. Cappiello a réalisé là un chef d’œuvre d’esprit, de bon goût et de gaieté. »
Autres décorations
Jacques Viénot disait: « Cappiello est un décorateur au sens le plus complet du terme : adroit, ingénieux, ayant le don de la mise en scène et de la présentation, il possède au plus haut point le sens du spectacle, de la fête. Il est apte à concevoir et à réaliser les décors les plus grandioses comme à se soucier des moindres détails du costume ».
Aujourd’hui, il ne reste plus que quelques décoratiions ou projets de décorations. Les immeubles où Cappiello avait travaillé ont tous été détruits. Seule la fresque du restaurant Dupont à Barbès a été sauvée de la démolition. Elle attend à New-York un nouveau mur d’accueil.